M'est avis que leur pays est une terre belle et plaisante, au-delà des mers de Bharat-Kanda. Qu'est ce qui a bien pu les pousser à voyager sinon la lune solitaire et affaiblie dans la carte de ce lakshmivan* - qui, défaut patent, se trouve aussi dans la sixième demeure de Jupiter. Si l'on considère plus avant les maisons de Vénus et du Soleil, n'est-il pas évident comme la groseille se détache sur la paume, qu'une affaire de cœur, et la bile agitée de la jeunesse, ont provoqué leur exil ? *prospère
Le souverain Simha régnant à Lanka est préoccupé par le comportement de son fils, le prince Jayasura. Ce dernier est un homme au cœur de glace, d'une grande insensibilité et qui s'ennuie de ses devoirs d'époux et de père. La Cour de Lanka ne peut pas admettre un telle attitude de la part d'un homme de son rang et qui plus est héritier du royaume. Le souverain s'en remis alors au sage Agastya qui vit au sommet du Mont Ravana. Le sage lui conseilla d'envoyer son fils en pèlerinage à Kashi avec un compagnon à la découverte de la réalité du Monde. C'est ainsi que, conformément à un édit royal émit par son père, le prince Jayasura partit avec son seul et unique ami Tilaka sur les routes de l'immense sous-continent Bharat Kanda pour y effectuer le Pèlerinage d'Argent. Du royaume du Kerala au Marava où se joignirent au duo deux nouveaux compagnons de route, du Marava à Maduraï, de Maduraï à Thanjavur, le prince Jayasura et son ami traversèrent le sous-continent de part en part afin de rejoindre la ville sainte de Kashi. Une traversée ponctuée de rencontres et de nombreux dangers mais qui marquera indéniablement les deux amis.
Le paradis dure le temps que le rêveur soit rassasié. Il se termine quand il est assoiffé des mouvements violents contre la vie inflexible que la terre seule permet. Le rishi dit que des siècles peuvent s'écouler sur terre avant que les paradis ne perdent leur charme ; mais cela finit par arriver. Alors, il y a renaissance, mais qui renaît ?
"Le Pèlerinage d'Argent" est un roman philosophique qui nous entraîne à l'époque de l'Inde médiévale même si l'on peut y détecter quelques éléments provenant d'une époque plus récente. Il nous offre une fabuleuse traversée de Bharat Kanda, l'Inde, de sa pointe Sud à Kashi, l'ancien nom de Bénarès/Vanarasi qui se situe au Nord. Un jeune prince sans cœur est envoyé en pèlerinage par son père pour apprendre les joies mais avant tout les maux du monde. Un monde nouveau s'ouvre à lui, loin des fastes qu'il connût jusqu'à présent sur son île de Lanka. La vie de pèlerin est rude et les déconvenues diverses, la traversée compte de nombreux dangers et l'on peut y faire de très mauvaises rencontres. Les deux compères ne resteront pourtant pas seul bien longtemps. En effet, après un épisode houleux avec des brigands maravas, de nouveaux accompagnants se grefferont à leur pèlerinage : la nouvelle épouse du prince et un purohita, un brahmane déclassé qui connaît le Sud de l'Inde comme sa poche. De ville en ville, de nombreuses rencontres animeront ce périple : poète, roi, guru, astrologue, médecin et bien d'autres. L'occasion d'aborder de nombreux sujets philosophiques en relation avec les domaines de prédilection de chaque intervenant mais également en relation avec les textes anciens. Des discussions sérieuses certes, mais l'auteur n'a pas omis d'y apposer une petite pointe d'humour. J'aimerais vous raconter plus de détails sur ces rencontres d'une grande richesse culturelle et philosophique mais je laisse le plaisir, la surprise et surtout la découverte au futur lecteur de ces débats souvent très animés. "Le Pèlerinage d'Argent" est une véritable immersion au XVIème siècle et une plongée au cœur de la culture et de la pensée indienne. A travers cette parution, Éric Auzoux son traducteur et les Éditions Banyan nous offre une pépite de la littérature indienne contemporaine. Ils nous invitent à découvrir le talent d'Anantanarayanan qui fut poète, magistrat et intellectuel et auteur en anglais de cet unique roman, un précurseur du postmodernisme indien. Un roman jugé comme étant un "Candide" indien ou même comparé au Kathâsaritsâgara, moi-même il m'a remémoré l'histoire d'un certain Kim de Kipling. "Le Pèlerinage d'Argent" est incontestablement un roman qui marquera les esprits. Il permet en outre à soutenir une petite maison d'Éditions et de prendre conscience de l'excellent travail de traduction entrepris par Éric Auzoux.
Le Pèlerinage d'Argent M. Anantanarayanan
Titre original : The Silver Pilgrimage
Roman traduit de l'anglais par Éric Auzoux
Éditions Banyan - Date de parution : mars 2017 - ISBN : 978-2955-2868-9-0 -227 pages - Prix de l’ouvrage : 19,60 €
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Quatrième de couverture
Au prince Jayasurya manque une qualité essentielle pour régner : la capacité à s’émouvoir. Son père, le roi Simha, décide donc de l’envoyer en pèlerinage à travers l’Inde, sans viatique ni escorte. Accompagné de son jeune ami Tilaka et d’un chapelain peu orthodoxe, il sera tour à tour prisonnier d’une bande de brigands, invité d’un roitelet mélomane, confident d’un marchand ayant découvert une bien curieuse civilisation puis d’un thérapeute aux méthodes annonçant celles d’un certain médecin viennois, pris à parti lors d’une joute entre adeptes de Vishnou et de Shiva, mais aussi témoin des ravages du choléra … Lors de sa parution, le grand critique Harvey Breith jugea ce « Candide » indien « doté d’une luminosité particulière », faisant ainsi sortir de l’ombre son auteur, M. Anantanarayanan (1907-1981), issu de cette génération d’écrivains à la curiosité insatiable injustement occultés par la stature imposante des leaders du combat pour l’Indépendance.
Merci Éric pour votre obstination à concrétiser ce projet, merci pour cette découverte.
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