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Mon tout premier souvenir : je devais avoir deux ans et demi ou trois ans. Gravée dans ma mémoire, l'image de ma mère de mon père qui s'approche à quatre pattes, en se traînant, car elle ne pouvait pas marcher. Mon petit frère qui braille en la voyant venir. Et elle, débordant de tendresse, qui essaie de chanter une berceuse. Elle avait quatre-vingt-dix ans. Moi aussi j'avais peur. Mais, comme le disait père, c'était notre grand-mère, après tout. Ce qui me rassurait. Ma peur a disparu quand j'avais quatre ou cinq ans. Cette scène ne s'est jamais effacée de mon esprit : la mère de mon père, à quatre pattes, essayant de câliner un enfant qui hurle. [Page 13]
Nalini Jameela est une "veshya", une travailleuse du sexe et une militante d'un syndicat de travailleuses du sexe appelé Jwalamukhi.
Lorsqu'elle était enfant, Nalini Jameela travaillait dans les mines d'argile, par choix et non par obligation. Elle a commencé à travailler, lorsque l'emploi de sa mère s'est trouvé menacé par l'activisme politique de son père, communiste.
A 18 ans, alors qu'elle était en mauvais terme avec ce dernier, Nalini quitta la maison familiale et le hasard voulu qu'elle rencontre un homme avec qui elle se maria. Mais le mariage ne dura à peine trois ans et demi car son époux mourra d'un cancer et de l'arack. Nalini dût alors subvenir seule aux besoins de ses deux enfants.
Elle décida alors de devenir une travailleuse du sexe, le meilleur moyen pour obtenir facilement les cinq roupies quotidien que lui réclamait sa belle-mère pour s'occuper des enfants. Le Kerala d'où elle est originaire, le Karnataka et le Tamil Nadu sont les trois États du Sud de l'Inde où Nalini Jameela exerça sa profession. Elle aura pendant sa "carrière" un répit d'environ douze ans grâce à son mariage avec un tamoul. Ce mariage, qui fut au début salvateur, lui aura au moins permis d’élever son troisième enfant un temps dans un meilleur environnement. Mais son mari devient trop volage et ruina le couple, Nalini tomba alors malade et dût à nouveau reprendre son précédent emploi, travailleuse du sexe. Peu de temps après elle intégra l'association "Jwalamukhi". Par son charisme, elle deviendra rapidement leur ambassadrice en Inde et à travers le monde.
Interrogez n'importe quelle travailleuse du sexe et vous découvrirez certainement que nos clients ne viennent pas tous rien que pour une passe. La plupart viennent aussi pour parler, ou avoir des conseils. Ce sont ceux qui ont fui la société qui ne viennent que pour le sexe. [Page 177]
"Autobiographie d'une travailleuse du sexe" est l'histoire vraie de Nalini Jameela. Dans ce récit d'environ 200 pages, initialement écrit en malayalam, la langue du Kerala, Nalini Jameela nous conte les grands épisodes de sa vie, de son enfance dans les années cinquante-soixante au milieu des années 2000. Grâce à cette "autobiographie", elle apporte un regard nouveau sur les travailleuse du sexe, loin des idées préconçues et des préjugés. Cet ouvrage est également l'occasion pour elle de parler des actions menés par son association de défense des droits des travailleuses du sexe et de nous livrer quelques anecdotes. Certes le style d'écriture est assez simple mais c'est une autobiographie bien structurée et bien dosée, sans chichi. Nalini Jameela est une travailleuse du sexe, et fière de l'être. Elle nous démontre également sa combativité à toute épreuve face à la vie qui n'a pas toujours été tendre avec elle.
Quand je me trouvais à Mangalore, j'ai un peu étudié la langue tulu. Et aussi le kannada. Lorsque le tulu m'est devenu familier, le kannada est devenu inutile. Après avoir quitté Mangalore et épousé Shahulkka, nous avons vécu dans différents lieux du Tami Nadu où j'ai appris et pratiqué le tamoul. Après le malayalam, le tamoul est la langue que j'ai le plus pratiquée. J'aime le style des orateurs tamouls et j'essaie de m'en inspirer. [Page 179]
Autobiographie d'une travailleuse du sexe
De Nalini Jameela
Titre original en malayalam (Kerala) : Oru Lymgikathozhilaliyude Atmakatha
Traduction en anglais par J. Devika Autobiography of a Sex Worker
Traduit de l'anglais (Inde) par Sophie Bastide-Foltz
Date de parution : juin 2008
Éditions Actes Sud - Collection Lettres indiennes -
ISBN : 9782742775163 - 201 pages - Prix éditeur : 18,80 €
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