"L'Empereur de Macao" de Christophe Masson
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"L'Empereur de Macao" de Christophe Masson

La vue depuis le Victoria Peak était saisissante. Une forêt de gratte-ciel, que les Hongkongais surnommaient des pencils buidings, minces comme des stylos, s'élevait au bord de la mer jusqu'aux premiers contreforts boisés de la montagne, tel un jeu colossal de Lego stoppé net par la pente vertigineuse qui venaient d'escalader les deux wagons rouges du funiculaire. De l'autre côté de Victoria Harbour, face àla partie historiquement anglaise de Hong Kong, s'étendait Kowloon la chinoise, et l'on devinait dans le lointain les monts des Nouveaux Territoires et terrière, vaste comme un continent, la Chine pressée d'apposer sa griffe sur cette possession rebelle.
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La parution d' "Ombre Chinoise" l'avait remis sur de bons rails et tant que le fer était chaud, il profita pour retourner en Inde pour écrire "L'Étoile de Bombay". C'est d'ailleurs au cours de l'écriture de ce dernier qu'il reçut une proposition d'une maison spécialisée dans le Septième Art qui lui demanda une collaboration. Le but étant d'associer une mégapole d’Extrême-Orient à un grand nom du cinéma qui l'avait popularisée et d'y aller pour y mener l'enquête tout frais payé. Son cœur, sans doute d'homme à femmes, associa immédiatement Hong-Kong non pas à Jackie Chan ou Bruce Lee - ce qu'il aurait paru plus logique - mais à Maggie Cheug pour laquelle il était tombé amoureux dans "In the Mood for Love". Mais son voyage ne le conduira pas uniquement à Hong-Kong car une autre mission l’attend dans la ville voisine de Macao pour le compte d'Antonio, le fils de son ancienne amante catalane Elena. Un objectif qui le mènera plus près de l'enfer des casinos que du monde des strass et des paillettes du Septième Art car il doit retrouver un tableau réalisé par le grand-père d'Antonio détenu par un vieux portugais installé à Macao depuis plus de soixante ans. Un tableau indispensable pour renflouer les caisses d'Elena et d'Antonio.


"L'Empereur de Macao" est un roman que j'ai été ravie de lire car j'avais eu vent, lors de la parution de "L’Étoile de Bombay", du voyage imminent de Christophe Masson à Hong-Kong et Macao. J'ai moi-même découvert ces deux villes il y a quelques années et j'en ai gardé de très bons souvenirs qui sont encore très présents dans ma mémoire. J'avais à l'époque rêvé d'Hong-Kong et Macao grâce à un certain Amitav Ghosh qui m'a fait découvrir dans sa trilogie de l'Ibis ces deux contrées et sa légendaire guerre de l'Opium. C'est donc avec beaucoup de plaisir que j'ai lu ces 204 pages qui, comme diraient nos amis québécois, passent comme du beurre dans une poêle. J'aime beaucoup ce style où les expériences personnelles et la fiction se mêlent, où l'on ne sait plus quand s'arrête l'une pour laisser place à l'autre. Ce que je préfère c'est la force de tous ces détails qui nous transportent littéralement sur les lieux du roman : Clermont-Ferrand, Copenhague, Hong-Kong et Macao. Les deux premières sont des villes que je ne connais pas, ce qui n'est pas le cas de Hong-Kong et Macao. Ainsi la lecture de ce roman m'a permis d'y retourner le temps d'une lecture et de me remémorer ces journées à marcher dans leurs ruelles à essayer de les découvrir dans ses moindres recoins et à trouver au détour de l'une d'elle des mystères venues d'un autre temps. Avec ce roman, c'était pour moi quasiment comme y retourner car nous y retrouvons l'ambiance des rues, son atmosphère. La finesse des détails de Christophe est franchement très impressionnante et captivante, j'avais l'impression de marcher à côté de ce narrateur qui est à la fois un peu de Christophe Masson et de Thomas, personnage fictif mais quelque part bien réel de "L’Étoile de Bombay". J'étais ravie d'y retrouver à travers les lignes un peu d'Amitav Ghosh et de Joseph Kessel dont "Hong-Kong et Macao" fut mon livre de voyage. "L'Empereur de Macao" m'a aussi permis de découvrir l'actrice Maggie Cheung et à travers elle le cinéma de Hong-Kong. La peinture a également une place dans ce roman, tout comme l'actualité. Outre ces sujets très intéressants, le livre comporte à sa base quelques petites intrigues que le lecteur découvrira au début du roman mais d'autres naîtront par la suite, tout comme quelques surprises qui apporteront du tonus à l'ensemble. Le roman parle de sujet plus sérieux de la maladie, de la dépendance aux jeux et du temps qui passe tout simplement. "L'Empereur de Macao" est un roman bien dosé et concentré qui mêle intrigue, sensualité et introspection. Une nouvelle et agréable lecture de Christophe Masson qui m'a donné envie de découvrir ses premiers romans. Pour les lecteurs qui cherchent l'Inde, il y a toujours une présence d'Inde dans les romans de Christophe Masson. Merci Christophe et merci de nous rassurer que vous êtes toujours vivant et toujours là, car j'ai hâte de vous lire à votre retour du pays des gauchos.


Au rebours de l'opinion générale dépeignant le cancer comme un agresseur qui nous serait étranger, je voyais le mien comme un de ces enfants d'une famille nombreuse qui désespère ses parents mais n'en demeure pas loin leur fils. Car les cellules malignes ne venaient pas d'ailleurs. On ne pouvait pas les apparenter à un virus apporté de l'extérieur. Elles étaient miennes, au même titre que n'importe quelle cellule saine qui aurait hélas mal tourné.
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L’Empereur de Chine de Christophe Masson

Éditions Revoir - Parution août 2016

ISBN : 978-2352650973 - 204 pages - Prix éditeur : 17 €



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