"La chair, les hommes et les dieux, la viande en Inde" de Michaël Bruckert
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"La chair, les hommes et les dieux, la viande en Inde" de Michaël Bruckert




L'Inde est le pays où le végétarisme est le plus observé dans le monde. Selon certaines études, l'Inde est le pays où les habitants ont le plus faible taux de consommation de viande dans le monde avec 3,2 kg par personne sur l’année (source ONUAA) alors que la moyenne mondiale est de 42 kg par personne et par an (source viande.info). Il peut paraître étonnant qu'en parallèle, l'Inde figurerait parmi le trio de tête, derrière l’Australie et le Brésil, dans l'exportation mondiale de bœuf.


Dans cet ouvrage, Michaël Bruckert nous aide à comprendre le rapport qu'ont les indiens avec la viande à travers l'étude des pratiques et des représentations qui y sont associés. On constate assez rapidement que le rapport des indiens avec la viande est assez complexe, et qu'il est loin d'être soit tout blanc, soit tout noir. L'image que l'on se fait sur le sujet en Occident est relativement erronée. Pour mener à bien cette thèse, Michaël Bruckert exploite les données sur l'ensemble du territoire indien mais il a choisi comme approche spatiale de la viande en Inde, l’État du Tamil Nadu dans le Sud de l'Inde. L'analyse est principalement portée sur la ville de Chennai (anciennement Madras et qui est la quatrième ville la plus peuplée en Inde) et sur certaines capitales de districts de cet État .

L'ouvrage est divisé en trois parties : "manger de la viande", "produire de la viande" et  "négocier la place et les statuts de la viande" et qui sont chacun divisés de trois à cinq chapitres. Sont soulevées nombre d'interrogations, comme par exemple : Quels sont les variabilités des comportements alimentaires dans les différentes parties en Inde ? - Est-ce que la viande est-elle impure ? - La viande est-elle bénéfique pour la santé ou au contraire est-elle toxique ? Y-a-t-il des viandes qui pourraient être bonnes pour la santé ? - Que mange-t-on au quotidien au Tamil Nadu ? - Qui sont les mangeurs de viande en Inde ? - Quelle place à la cuisine dans une habitation indienne ? - Est-ce que les végétariens consomment-ils uniquement de la nourriture végétarienne ? - Où est consommé la viande et dans quel contexte ? Quels viandes sont consommées ? - Existe-t-il un accroissement de la consommation de la viande en Inde ? - Comment fonctionne l’élevage des animaux en Inde ? - Existe-t-il le système d'élevage intensif en Inde ? - Quels sont les espèces de bovins destinés à la boucherie et d'où proviennent-ils ? - Quel est la législation anti-abattage des bovins ? - Comment fonctionne le processus : collecte, transit du bétail en Inde ? Quels sont les différents réseaux d'échange d'animaux et sont-ils les mêmes pour chaque espèce ? Comment fonctionne le système d'abattage des animaux en Inde ? - Comment sont abattus les animaux (manuel, mécanisé ou industriel) ? - Trouve-t-on des abattoirs modernes ? -  L'Inde compte-t-il des boucheries et comment ont-elles évoluées ces dernières années ? - Comment définie-t-on l'espace dans une ville indienne, existe-t-il des territoires carnés et des territoires végétariens ? Où trouve-t-on les boucheries et les restaurants non-végétariens ? - L'Inde est-il le premier exportateur mondial de viande de bœuf ? - Quels sont les circuits de la viande dans l'espace social ? Au niveau politique, quel place a la viande ?

Ces questions ne sont qu'une infime partie de celles qui ont été minutieusement analysées par Mickaël Bruckert au fil de cet ouvrage et qui permettent de soulever ce sujet si délicat de la place de la viande en Inde. "La chair, les hommes et les dieux" est un ouvrage extrêmement intéressant, offrant une analyse claire et précise sur le sujet. Demandant un minimum de connaissances sur le sujet, les thèses ne sont généralement pas facile à lire pour tous. Pourtant dans cet ouvrage Mickaël Bruckert a su rendre la lecture passionnante et avant tout enrichissante. Il permet de comprendre le fonctionnement de la société indienne à travers un sujet qui pourrait être pour nous occidentaux banale mais qui prend en Inde une autre dimension. Il permet en outre de comprendre la complexité de l'alimentation des indiens mais également d'éclairer les discours qui sont aujourd'hui établis autour du végétarisme et la notion de vache sacrée.

Cet ouvrage est le fruit de plusieurs années de recherche, notamment dans le cadre d'un doctorat en géographie humaine. La thèse dont est issu cet ouvrage a reçu le prix de l'innovation de thèse de la Société de géographie.


Quatrième de couverture

Les études actuelles sont alarmantes : la consommation de viande dans le monde a explosé ces dernières décennies, jusqu’à enregistrer en cinquante ans une croissance de 1 400% en Asie, au risque d’une crise sanitaire et écologique sans précédent.

En Inde, pourtant, la viande est marginale, voire parfois proscrite : sa consommation est régulée par des logiques religieuses, morales, médicales ou économiques. L’on ne mange pas la même chose, ni de la même façon, selon que l’on est hindou de haute ou basse caste, musulman ou chrétien, homme ou femme, urbain ou rural, militant nationaliste ou partisan du sécularisme. Car la viande est également un véritable objet politique, support de revendications identitaires.

L’urbanisation, l’industrialisation, la mondialisation, modifient néanmoins progressivement les réseaux d’approvisionnement, ainsi que le rapport des Indiens à cet aliment singulier dont la consommation augmente. Cette transition alimentaire n’est cependant pas généralisée, tant les pratiques diffèrent en fonction des types de viandes, des individus et des contextes. En Inde, le rapport à la viande contribue à dessiner des géographies, façonnant des territoires et des circuits, définissant des distances réelles ou symboliques entre les hommes et les animaux.

À l’heure où l’Occident s’interroge sur sa consommation carnée, cette belle étude du monde indien offre une résonance particulière.


 

La chair, les hommes et les dieux

La viande en Inde

De Michaël Bruckert

CNRS Éditions - Discipline : Géographie - Date de parution : 11 janvier 2018 - ISBN : 978-2-271-11524-9 - Format : 15.0 x 23.0 cm - Reliure : Broché - Pagination : 408 - Prix éditeur : 25 €


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