Chaque année, des milliers de femmes déprimées, maltraitées, maudites, malheureuses et sans enfant affluent vers des lieux tels que le Maricha Kunda. Là-bas, elles se livrent une bataille indigne pour trois cruches d'eau, que les grands prêtres de la fécondité ne vendront qu'aux plus offrantes. Des cris de désespoir s'élèvent pendant la vente du premier pichet, censé détenir la plus grande force susceptible de libérer toute femme d'une vie entière de maltraitance et d'abandon. Bon nombre de ces Indiennes désespérées seront bientôt des bannies ; après les avoir expulsées de leurs foyers, leurs maris y installeront des épouses plus jeunes et plus fécondes.
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Simran Singh, travailleuse sociale à Delhi, exerce également à la clinique de la Vierge à l'Enfant, un établissement ultra-moderne qui se situe dans le quartier de Gurgaon, une proche banlieue de la capitale indienne. La clinique de la Vierge à l'Enfant, dont l'ouverture est récente, est un établissement dont l'activité principale est la gestation pour autrui. Elle permet à des couples, souvent étrangers, d'avoir un enfant via une mère porteuse. Cette clinique est gérée par la cousine de Simran, Anita et par son époux le Docteur Subhash Pandey. Tous deux font le nécessaire afin que leur activité dégage un bon rendement mais sans négliger le bien-être des patientes qui vivent durant les neuf mois de leur grossesse dans la clinique. Simran a secondé Anita et Subhash dans la mise en place d'un système d'entraide à ces femmes. Les mères porteuses, qui sont souvent illettrées, y reçoivent notamment des cours. Simram essaye d'être à l'écoute de ces femmes, mais l'est également pour les couples qui font appel aux services de la clinique. Malgré les procédures rigoureuses, une succession de problèmes viennent d'arriver à la clinique. Il est donc nécessaire de connaître l'origine de cette défaillance, d'autant plus que la vie d'un nourrisson est en jeu. En effet, Amelia, le nom de ce nourrisson, est née séropositive et la mère porteuse, qui devait retourner dans sa famille, a mystérieusement disparu. Les parents adoptifs de la petite Amelia sont décédés dans un étrange accident de voiture lors de leur voyage au Rajasthan, un cadeau de la clinique. Il faut lever le voile sur ces mystères mais l'objectif principal est est de trouver une famille en lien de parenté avec le couple décédé afin qu'Amelia puisse être adoptée. Mais là encore les choses se compliquent car les informations personnelles des parents adoptifs sont inexactes. Pour sortir de cette impasse, la clinique a demandé à Simran des les aider. Elle devra se rendre à Londres pour retrouver un parent pour la petite Amelia et découvrir par la même occasion qui a été l'expéditeur des embryons avec pour seul indice le nom et prénom d'un britannique. Simran, par amour pour cette petite, surmontera sa peur de l'avion mais devra mener une enquête des plus complexes.
"Les origines de l'amour" est un roman polar écrit par l'auteure indienne Kishwar Desai, fille de policier. C'est le second polar qui met en scène le personnage de Simran Singh, une femme originaire du Pendjab et qui est travailleuse sociale à Delhi. Contrairement à "Témoin de la Nuit", "Les origines de l'amour" met en scène plusieurs personnages, en plus de Simran Singh : - le Docteur Subhash Pandey qui est le directeur de la clinique de la Vierge à l'Enfant ; - le Docteur Ashok Ganguly qui est le bras droit du couple Pandey mais qui se livre à certaines étranges expériences dans le dos de ses confrères ; - le couple de britanniques Kate et Ben qui n'arrivent pas à avoir d'enfants (Kate a fait de nombreuses fausses couches et Ben avait un grand-père qui vivait en Inde à l'époque coloniale) - Mehta, un agent des douanes de Delhi, qui aura une lourde mission, celle de livrer des conteneurs d'embryons à une clinique, très particulière, de Mumbai. Une tâche ordonnée par son supérieur Ali, qui touche par cette mission illégale des pots-de-vin et qui est un homme qui souhaite faire le jihad contre l'importation d'embryons européens en Inde et l'utilisation des femmes comme mère-porteuse - Sonia, qui est venue à Delhi pour gagner de l'argent pour l'éducation de ses enfants restés au village. Elle est exploitée par Rohit, un homme violent qui n'hésite pas à la prostituée auprès de ses collègues du ministère de la Santé où il travaille. Pour s'en sortir, elle veut devenir mère-porteuse. Ces différentes "intrusions" dans le déroulement de l'enquête de Simran permettent de voir sous différents sous différents angles, les tenants et les aboutissements de l'affaire qu'elle doit et qu'elle va résoudre. Une très belle synchronisation mais qui peut, il faut l'avouer, emmêler le lecteur sur la chronologie des faits. Le style de nouveau roman-polar diffère de "Témoin de la nuit" où l'unique intervenante était Simran. Dans "Les origines de l'amour", l'auteure a choisi de tisser son roman-polar autour de la gestion pour autrui. Le lecteur découvre ces mères porteuses indiennes, souvent sans un sou, qui pour subvenir aux besoins de leur famille, mettent en location leur corps pour une durée de presque un an. A travers ce roman-polar, Kishwar Desai permet au lecteur de découvrir les cliniques modernes mais n'oublie pas de nous rappeler qu'elles ne le sont pas toujours et que le confort des mères porteuses n'est pas l'objectif principal de ces établissements. Un autre point sur la gestion pour autrui est abordé par Kishwar Desai dans "Les origines de l'amour", ce que pensent les indiens à ce sujet, notamment lorsque les couples adoptants sont étrangers et même homosexuels. Même dans les banques de spermes, l'importance de la caste et de la religion a son importance. Un autre sujet est abordé, celui du trafic des embryons humains. Pour ce sujet, Kishwar Desai s'est inspiré d'un fait divers, celui de la saisie des embryons à l'aéroport de Mumbai. Grâce à l'écriture des ses romans-polars, Kishwar Desai permet d'aborder des sujets de société sur l'Inde. "Les origines de l'amour" met en lumière des sujets tabous : la gestion pour autrui et le trafic des embryons humains. "Les origines de l'amour" offre une belle lecture qui pousse au questionnement et incite à la réflexion.
L'Inde était une excellente destination pour ceux qui voulaient faire des affaires, mais ses indicateurs sociaux affichaient des résultats catastrophiques. C'était le genre de pays dont on pouvait tomber amoureux, mais où il était impossible de s'y installer.
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La situation était complètement différente aux Etats-Unis ou en Europe, car les femmes y étaient plus instruites ; elles connaissaient leurs droits et savaient à quoi elle s'engageait. En Inde, une femme instruite de la classe moyenne,, pourvue d'un minimum d'estime de soit, n'accepterait jamais de porter l'enfant d'un autre couple, à moins d'une raison impérieuse. Dans leur hôpital, une mère avait donné naissance à l'enfant de sa propre fille l'an passé, car celle-ci était incapable de mener une grossesse jusqu'à son terme.
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Mais Ali pouvait difficilement parler au Dr Pandey de son jihad contre la gestation pour autrui. De sa haine pour cette femme et sa tribu. Il voulait tous les voir brûler en enfer. Par la faute de gens comme eux, son unique soeur s'était laissé persuader de louer son ventre à un cheikh d'Arabie Saoudite plein aux as et sans enfant. L'homme recherchait une femme pieuse, et la jeune Indienne avait cédé à la tentation de gagner un million de roupies. Une mère de deux enfants ! Quel honte !
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Sa sécurité était primordiale. Après tout, si des gens voulaient se débarrasser de moi juste à cause de mon enquête, ils essaieraient sans doute de supprimer la dernière preuve de leurs méfaits - la petite Amelia elle-même. C'était une pensée franchement effrayante.
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Les origines de l'amour
De Kishwar Desai
Titre original : Origins of Love
Roman traduit de l'anglais par Benoîte Dauvergne
Éditions de l'Aube - Collection : L'Aube noire
Broché - Date de parution : 22/05/2014 - ISBN : 978-2815909303 - 272 pages - Prix éditeur : 21,90 €
Poche - Date de parution : 06/01/2015 - ISBN : 978-2815911245 - 544 pages - Prix éditeur : 11,80 €
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