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"La tante qui ne voulait pas mourir" de Shirshendu Mukhopadhyay


Prend-le et cache-le dans ta chambre. Personne ne doit rien savoir. Mais si tu crois que je te lègue, tu peux rêver. Ils vont sortir de partout comme des vautours quand ils découvriront que je suis morte. C’est pourquoi je me débarrasse du coffret.Planque-le. Ce sont mes bijoux chéris ... [Page 22]



C'est à l'âge de dix-huit ans que Somlata est mariée à un fils d'une famille aisée de zamindars bengalis, de quatorze ans son aîné. Contrairement à ce que les gens croyaient, la richesse de cette famille de propriétaires terrains n'est plus ce qu'elle était et ils ont même dû emprunter de l'argent pour ce mariage. Mais peu importe pour Somlata, elle se sent chanceuse, bien que son mari est paresseux, il est un bel homme et bon avec elle.

Dans la maison familiale d'une ville sans intérêt, vivent plusieurs générations issues de différentes branches. Alors qu'aux différents étages, les gens s'entassent, au deuxième vit Pishima et uniquement elle. Pishima est veuve depuis son adolescence et possède un coffre où sont rangés des bijoux d'une valeur inestimable et convoités par les membres de sa famille. Même si la famille est dans le besoin, Pishima n'a jamais cédé un seul bijou de son coffre. Un jour, alors que Somlata veut se rendre sur la terrasse qui se situe au-dessus du deuxième étage, Pishima l’interpelle et lui demande de mettre en lieu sûr son coffre. Dévouée, Somlata s’exécute mais Pishima est déjà morte. Somlata vient de parler pour la première fois au fantôme de Pishima qui continuera à se manifester pour vérifier que le précieux contenu de son coffre est intact.





"La tante qui ne voulait pas mourir" est la traduction française du célèbre roman bengali "Goynar Baksho" de Shirshendu Mukhopadhyay, un célèbre et populaire auteur bengali. "Goynar Baksho", qui signifie en bengali "Le coffret à bijoux", a été porté par l'écran par la réalisatrice Aparna Sen.


"La tante qui ne voulait pas mourir" est l'histoire de Somlata, la parfaite épouse indienne, dévouée, débrouillarde, qui a de la suite dans les idées et qui est la gardienne d'un coffre rempli de bijoux. En parallèle à son histoire, il y a celle de Somlata, une adolescente au caractère fort et qui contrairement à ses amies ne rêvent pas (encore) de mariage.

"La tante qui ne voulait pas mourir" pourrait être considéré comme une satire familiale. Elle met en scène une famille de zamindars, des propriétaires terrains, dans le déclin. Certes, cette perte financière a, en partie, pour origine la Partition - en 1947, le Bengale avait été scindée en deux pour appartenir pour le côté est à l'Inde et le côté ouest au Pakistan et qui deviendra le Bangladesh en 1971 - mais la paresse et l’oisiveté transmis de générations en générations a également une grande part de responsabilités dans cette déchéance. Quant on sait que les zamindars sont de vrais tyrans, sans foi ni loi dans neuf cas sur dix (ou plus), abusant de leur pouvoir notamment auprès de la classe pauvre, Shirshendu Mukhopadhyay s'est sans doute bien amusé à les mettre dans une position de faiblesse. De plus, ils s'agit d'hommes et que ce sont les femmes qui tiennent en quelque sorte le pouvoir dans le roman. Il y a d'abord la vieille tante Pishima qui préfère les voir mourir de faim que de leur donner ne serais-ce qu'un bijou ou la nouvelle arrivée de la famille, Somlata, issue d'une classe pauvre et qui les aidera à les sortir de leur torpeur dans laquelle ils sont bien embourbés.

Vous l'aurez compris, "La tante qui ne voulait pas mourir" est un roman qui casse les préjugés de la femme en Inde. Dans cette histoire, les femmes sont plutôt dominantes que dominées et elles jouent avec adresse et finesse avec ces hommes. Boshon quant à elle, représente la nouvelle génération, une enfant choyée et assez libre dans ses agissements et sa façon de pensée.

Dans cette centaine de pages de ce magnifique roman, nous y retrouvons toute l'âme du Bengale et de la littérature bengalie. Nous avons une chance incroyable de découvrir l'écriture de ce grand auteur bengali Shirshendu Mukhopadhyay traduite pour la première fois en français et qui reste une œuvre majeure de ce dernier.

"La tante qui ne voulait pas mourir" est un roman à découvrir.


La femme et l'homme sont censés se compléter. Je ne suis pas d'accord. Je pense que je me débrouillerai bien mieux sans homme. Je m'en allai vers le lointain, main dans la main avec la solitude, ma meilleure amie. [Page 46]

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"La tante qui ne voulait pas mourir"

De Shirshendu Mukhopadhyay

Titre original en bengali : Goynar Baksho

Traduit de l'anglais par Edith Ochs d'après le texte traduit du bengali par Arunava Sinha Éditions Calmann Lévy - Date de parution : 14 avril 2021 - ISBN : 9782702167410 - 128 pages - Prix éditeur : 15,90 €



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