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"Le Magicien de la Finance" de Rasipuram-Krishnaswami Narayan

Une boîte en fer-blanc grise, décolorée et pourvue de boutons-poignées, assez petite pour être portée sous le bras, contenait la quasi-totalité de son équipement : une bouteille d'encre, un porte plume et un buvard ; un petit registre aux pages couvertes de noms et de chiffres ; enfin, éclipsant en importance tout le reste, des formulaires de demandes de prêt du Crédit Coopératif. Ces papiers représentaient sa plus grande richesse.


Margayya avec sa petite boîte en fer blanc et son petit registre, se prend pour le banquier des pauvres sous le banian en face du "Crédit Coopératif" de la ville de Malgudi. Pour les paysans venus le consulter, il est le Magicien qui leur permet d'obtenir du Crédit Coopératif des prêts illimités. Pour autant, Margayya est un homme qui a de faibles revenus et a du mal à satisfaire les besoins de sa famille. Par les caprices du destin, Margayaa perd subitement la main et abandonne son activité sous le banian. Sur les conseils du prêtre du temple où il s'est réfugié, il se lança alors quarante jours durant, à invoquer Lakshmi pour attirer les bonnes grâce de cette dernière et celle de Saturne. Margayya y immergea plus serein mais surtout appauvri et sans but. Mais le destin frappa à nouveau à sa porte et Margayya se retrouvera d'un coup fortuné grâce à la parution d'un ouvrage quelque peu sulfureux "Harmonie conjugale", un manuscrit qu'il reçut pour quelques roupies mais pour lequel il dégagea un important bénéfice. Après quelques temps dans le monde de l'édition, Margayya n'a plus envie de travailler dans ce domaine car il a toujours préféré jouer au banquier. C'est alors qu'il décide de reprendre son activité d'avant.




"Le Magicien de la finance" est une histoire ironique sur un entrepreneur, Margayya, dont les efforts sont constamment ruinés par son fils unique Balu. L'histoire se déroule sur une période d'une douzaine d'années durant les années 1930-1940. Elle débute lorsque Balu est enfant et se termine alors qu'il est devenu adulte et lui-même père de famille. Balu, fils désiré et unique, est un enfant capricieux, turbulent et fainéant. Margayya souhaite la réussite de son rejeton en lui permettant d'accomplir de brillantes études en engageant même des précepteurs pour le pousser au sommet. Pourtant Balu, très colérique et imprévisible, ne réalisera pas les rêves de grandeur voulus par son père et les réduira en poussière sans aucun scrupule. Comme les autres romans de Narayan, "Le Magicien de la finance"  se déroule dans la ville imaginaire de Malgudi en Inde du Sud. L'écriture de Narayan est comme à son habitude assez simple et il n'existe pas réellement de chapitres, l'histoire est contée en un bloc avec uniquement quatre parties dont une minuscule. Pourtant c'est un roman avec une force philosophique, propre à son auteur. Le lecteur est plongé dans les méandres des pensées de Margayya, où y trouve une place très importante pour l'argent, toutes ses analyses sur le monde qui l'entoure a toujours une relation avec l'argent. Margayya est motivé par son insatiable convoitise pour la richesse, ce qui finit par lui faire abandonner sa modeste vie sous le banian pour des rêves toujours plus ambiteux et une puissance qui ne dure jamais très longtemps. Pourtant, Margayya ne vivra pourtant pas chichement de sa fortune et la laissera s'endormir au fond de sa petite maison des sacs postaux remplis d'argent. Il est avare mais surtout très radin, il est escroc, mais un escroc honnête. Il aime posséder mais ne jouit pas de ses possessions. Il a une force naturelle à convaincre les gens à investir souvent toutes leurs possession. Il a un bon répondant et un sacré bagout. Pourtant, une chose qu'il ne maîtrisera jamais c'est son fils.


"Le Magicien de la finance" est un roman qui se lit facilement et pour lequel on apprécie sa moral. Il y a beaucoup de choses à en tirer. Pourtant j'ai regretté la vitesse à laquelle le roman se déroule, on fait l'impasse sur certaines périodes et cela est assez déstabilisant, laissant une impression d'inachevé. Pour autant, si vous avez envie de faire un saut dans le monde des finances à l'indienne, ce livre vous offrira une très bonne formation d'expert financier. Enfin, pour terminer cet article, à noter que ce roman, publié la première fois en 1952, a fait l'objet, comme "Le Guide et la Danseuse", d'une réadaptation au cinéma en 1983 en langue kannada (langue que l'on trouve principalement dans l'Etat du Karnataka où l'on trouve la ville de Bangalore) sous le nom de "Banker Margayya". Ce film a même remporté des prix.


Car dans le milieu des affaires comme dans les cercles politiques, la perspective d'engager sa parole engendrait une véritable terreur. On y cultivait unanimement, au même rang qu'une vertu, la faculté de se ménager des échappatoires, que Marayyan possédait de façon innée. Toute comme le musicien produit la note juste dès sa naissance et l'écrivain décrit d'emblée l'expérience en termes adéquats, l'homme d'affaires est naturellement capable de prononcer tout un discours censé signifier quelque chose, mais qui, à bien regarder, exprime des généralités qui ne l'engagent à rien.



Margayya emporta le manuscrit chez lui avec la même discrétion qu'il l'aurait fait d'un cadavre d'enfant. Il redoutait d'être arrêté dans la rue par quelqu'un qui demanderait à le voir. Pal avait consenti, sur son insistance, à l'envelopper dans un papier. Une ancienne édition du Silver Way avait fait l'affaire.




 

Le Magicien de la finance

De Rasipuram-Krishnaswami Narayan

Titre original : The Financial Expert

Traduit de l'anglais (Inde) par Dominique Vitalyos

Editions Zulma • ISBN 978-2-84304-60-87 • 366 pages• Prix éditeur : 21,50 € • Parution le 04/04/2013



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