Quelques semaines après la parution de "Fuir et revenir" aux Éditions Emmanuelle Collas, Prajwal Parajuly s'est prêté au jeu des questions-réponses que je lui ai proposé. Confinement oblige, c'est depuis Calcutta et par vidéo qu'il nous parle de "Fuir et revenir" initialement publié sous le titre "Land Where I Flee". L'occasion pour lui de faire découvrir au public francophone son roman, original.
Les non-anglophones peuvent activer les sous-titres.
Après la vidéo, vous trouverez la présentation du roman, la présentation de l'auteur et notre échange par écrit concernant "Fuir et revenir".
Quelques mots sur le roman
Dans le but de célébrer le chaurasi, le 84ème anniversaire, de leur grand-mère Chitralekha, ses petits-enfants se rendent à Gangtok, dans l'État indien du Sikkim dans l'extrême nord-est indien. Cela fait près de 18 ans qu'ils ne sont pas tous retrouvés sous le même toit, les retrouvailles ne peuvent qu'être explosives. Dans ce roman, Prajwal Parajuly exploite, un brin sarcastique, de nombreux thèmes, certains inédits dans un roman.
Quelques mots sur l'auteur
Prajwal Parajuly est un auteur indien-népalais dont les travaux portent sur les peuples de langue népalaise et leur culture. Fils d’un père indien et d’une mère népalaise, il partage son temps entre New York, Oxford et sa ville natale de Gangtok au Sikkim. Son premier recueil de nouvelles, "The Gurkha’s Daughter" (Quercus) a été plébiscité par la critique et nominé pour le Prix Dylan Thomas. Une de ses nouvelles "Aucune terre n'est la sienne" a été traduite en 2016 et publié aux Editions Jentayu pour sa revue.
Il a également écrit "Land where I flee" en 2013, un roman qui a été publié le 6 mars 2020 sous le titre de "Fuir et revenir" par les Éditions Emmanuelle Collas.
Interview avec Prajwal Parajuly - mars 2020
Véronique : Ce qui fait la force de ton roman, en plus du lieu, sont tes personnages très atypiques. Parle-nous de tes personnages, de leur originalité, et dis-nous lequel est ton préféré ...
Prajwal Parajuly : J'ai eu différents personnages préférés à différents moments. Lorsque j'écrivais le livre, j'étais absolument amoureux de Manasa, de son amertume, du fait qu'elle était toujours en désaccord avec Chitralekha, et j'aime vraiment Prasanti pour des raisons évidentes. Mais si vous me demandiez quel est mon personnage préféré parmi tous, ce serait Chitralekha. J'aime quel dur à cuire elle est. J'aime la façon dont elle fume son beedi. J'aime le fait qu'elle souffle de la fumée sur le visage de sa petite-fille. J'aime la façon dont elle intimide les hommes de pouvoir. L'une des raisons pour lesquelles j'ai écrit Chitralekha était parce que j'étais malade et fatigué de lire sur des mamies de 84 ans qui passaient tout leur temps à mettre en conserve des cornichons pour les mettre au soleil et à raconter des histoires à leurs petits-enfants. Chitralekha est exactement l'opposé de ces mamies, et l'écrire était très amusant.
V. : Qu'est-ce qui rend ton roman original ?
PP: "Land Where I Flee" est un roman "inconfortable" - cela ne fait aucun doute. J'ai souvent dit que j'avais décidé de prendre en compte tous les tabous sud-asiatiques auxquels je pouvais penser et que je me suis éclaté, donc il y a de la sexualité, de la classe, de la caste, du genre, et tout se réunit dans ... une harmonie imparfaite ?
V. : Comment s'est passé l'écriture de ce roman ? Dans quelle ambiance ?
PP: "Writing Land Where I Flee" était très amusant. Tout d'abord, c'était une époque où je venais de conclure un contrat multi-pays de deux livres, et la presse me traitait comme si j'étais le prochain Gandhi, donc j'étais dans de bonnes conditions, et le roman a juste jaillit de moi. Le premier projet m'a pris environ deux, peut-être trois mois à écrire. C’est un livre amusant, n’est-ce-pas ?
V: On oublie souvent que derrière un roman de littérature étrangère, il y a un traducteur et que son travail est précieux. Parle-nous de ta traductrice, qui a traduit de nombreux romans sur l'Inde, et de tes relations avec elle.
PP: La traductrice, Benoîte Dauvergne, et moi avions travaillé dans le passé. Elle a traduit une de mes histoires de mon premier livre pour un magazine fantastique appelé "Jentayu", et c'était merveilleux de collaborer à nouveau avec elle pour "Land Where I Flee". Elle est super efficace, extrêmement talentueuse et je pense qu’elle me rend beaucoup plus intelligent que je le suis. Je suis à peu près sûr que la traduction est bien meilleure que l'original.
VS: "Fuir et revenir" est un roman remarquable et ton écriture est sublime. Pourquoi avoir fait le choix - par ailleurs judicieux - d'y apporter tant de personnages peu aimables ?
PP: Oui, oui, le livre est peuplé de personnages peu aimables. Quiconque recherche des personnages sympathiques doit donner un coup de pied à l'arrière. Honnêtement, je suis malade et fatigué que tout le monde devienne des personnages sympathiques, avec des caractères sympathiques. Le monde est plein de personnages peu sympathiques. Je suis un putain de personnage peu sympathique. Les personnages peu aimables sont bien plus amusants à écrire que les personnages sympathiques.
J'espère que ce post, vous donne envie d'acquérir ce roman. Je ne peux que vous le conseiller. N'hésitez pas. à vous le procurer.
En plus d'avoir une lecture passionnante et addictive, sur des sujets souvent originaux, dans un État peu présent dans les romans de littérature indienne, vous soutenez le travail d'un auteur, d'une maison d'éditions, d'un traducteur et de votre libraire.
Très belle lecture à vous ...
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